Toujours compliqué le retour en Suisse après un séjour au Sénégal. Encore là-bas mais déjà ici puisque le rythme du travail m’a happée à peine un pied posé sur le tarmac.
Quelle souplesse à déployer, quel grand écart entre les contingences, les conditions d’ici et de là-bas.
Poser les mots sur l’écran pour prolonger l’ailleurs et ne pas céder trop vite à l’omniprésence de l’ici. Voir surgir les lettres sur l’ordinateur pour poser un bilan aussi.
Nous avons entamé la collaboration de manière chaotique puisque les 120 kg de bagages (livres, dossiers, habits – merci aux donateurs) sont restés à Bruxelles et ne nous sont parvenus à Toubacouta que 4 jours après notre arrivée sur les lieux de travail.
Par contre nous remercions chaleureusement Monsieur Samb, proviseur au lycée de Karang et Monsieur Mbengue, coordinateur et responsable de dokando à Karang pour l’organisation ponctuelle, efficace des inscriptions aux 10 modules de formation continue que nous avons proposés en nous référant systématiquement aux programmes édictés par le ministère de l’éducation sénégalais. Quelle digne forme de reconnaissance que d’arriver sur place et de constater que tout est planifié et que nous pouvons nous mettre immédiatement au travail.
Est-il encore utile de rappeler que le foisonnement des beamers, des ordinateurs et autres appareils sous nos latitudes ne peut rivaliser avec le vide des salles de classe ? Beaucoup de tables-bancs gisent dans la cour ; certaines subissent les assauts des menuisiers.
L’électrification récente du lycée n’empêche pas les nombreuses coupures et le recours à la « torche ». (lampe de poche). Cette année nous avons tous travaillé de 15.00 à 19.00, voire 20.00 afin de ne pas nuire au fonctionnement des premiers cours de la rentrée scolaire. Nos échanges se sont souvent poursuivis dans l’obscurité de la nuit qui tombe : les mots prenaient une autre couleur, une autre épaisseur ; le sentiment d’un partage encore plus serré autour du faisceau lumineux.
Les quelque 40 heures d’échanges laissent un éventail de traces : la curiosité pour des didactiques qui bousculent les habitudes ; l’émouvant dans des mots-confidence envers le statut des jeunes filles ; la résistance à l’égard de pratiques autres ; le partage des idées, des connaissances en rhétorique, en métrique ; le rire des jeux d’imitation…
Chacun, là-bas, ici, reprend son rythme mais ce vécu dépose ses sédiments, habite, nourrit l’être, le module, lui donne une autre dimension. Merci à vous tous, chers collègues d’ici et de là-bas.
Christine pour dokando